Ah ils nous en ont fait avaler des couleuvres
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De Prague à Budapest de Sofia à Moscou
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Les staliniens zélés qui mettaient tout en oeuvre
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Pour vous faire signer les aveux les plus fous
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Vous aviez combattu partout la bête immonde
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Des brigades d’Espagne à celles des maquis
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Votre jeunesse était l’histoire de ce monde
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Vous aviez nom Kostov ou London ou Slansky
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Au nom de l’idéal qui nous faisait combattre
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Et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui
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Ah ils nous en ont fait applaudir des injures
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Des complots déjoués des dénonciations
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Des traîtres démasqués des procès sans bavures
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Des bagnes mérités des justes pendaisons
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Ah comme on y a cru aux déviationnistes
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Aux savants décadents aux écrivains espions
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Aux sionistes bourgeois aux renégats titistes
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Aux calomniateurs de la révolution
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Au nom de l’idéal qui nous faisait combattre
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Et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui
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Ah ils nous en ont fait approuver des massacres
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Que certains continuent d’appeler des erreurs
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Une erreur c’est facile comme un et deux font quatre
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Pour barrer d’un seul trait des années de terreur
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Ce socialisme était une caricature
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Si les temps ont changé des ombres sont restées
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J’en garde au fond du coeur la sombre meurtrissure
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Dans ma bouche à jamais la soif de vérité
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Au nom de l’idéal qui nous faisait combattre
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Et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui
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Mais quand j’entends parler de «bilan» positif
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Je ne peux m’empêcher de penser à quel prix
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Et ces millions de morts qui forment le passif
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C’est à eux qu’il faudrait demander leur avis
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N’exigez pas de moi une âme de comptable
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Pour chanter au présent ce siècle tragédie
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Les acquis proposés comme dessous de table
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Les cadavres passés en pertes et profits
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Au nom de l’idéal qui nous faisait combattre
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Et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui
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C’est un autre avenir qu’il faut qu’on réinvente
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Sans idole ou modèle pas à pas humblement
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Sans vérité tracée sans lendemains qui chantent
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Un bonheur inventé définitivement
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Un avenir naissant d’un peu moins de souffrance
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Avec nos yeux ouverts en grands sur le réel
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Un avenir conduit par notre vigilance
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Envers tous les pouvoirs de la terre et du ciel
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Au nom de l’idéal qui nous faisait combattre
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Et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui |