| J’ai été poursuivie, asservie, enlevée à l’Afrique et livrée…
|
| Le matin, au lever, j’accomplis mes corvées et ma vie est rivée…
|
| Y’a pas d’champs d’canne en jachère
|
| Tous les jours on y laisse et sa sueur et sa chair
|
| Et nos pauvres corps meurent, sans repos ni fraîcheur
|
| Avec chapeaux et foulards, pour contrer la chaleur
|
| Descendants d’ces féroces croisières négrières
|
| On garde force et courage, en chantant à plusieurs
|
| Il n’y a pas qu’le salaire, pour creuser nos malheurs
|
| Nos anciens tortionnaires, sont nos nouveaux employeurs
|
| Après avoir brûlé les barrières, arraché la lanière du fouet et levé les
|
| paupières vers la lumière
|
| Et venir embrasser le rêve d’une vie meilleure
|
| Où le nègre hisserait une bannière à ses propres couleurs
|
| On a mangé la poussière, de la pire des manières
|
| Peu fiers de retourner dans la plantation d’hier
|
| La mer est une frontière, comment aller ailleurs?
|
| Désormais libres, ouais, mais toujours inférieurs
|
| J’ai été poursuivie, asservie, enlevée à l’Afrique et livrée, pour un sac de
|
| sucre
|
| Le matin au lever, j’accomplis mes corvées, et ma vie est rivée,
|
| à un sac de sucre
|
| Où va l’fruit de mon labeur, la douleur de mes bras et mes lombaires
|
| La lourdeur de mes jambes et toutes ces longues heures à ratiboiser la canne
|
| pour battre ma misère
|
| Et les blancs sont aisés, malins et rusés
|
| Ont belles maisons et 'ti mounes scolarisés
|
| Soi-disant qu’il ne faut rien leur refuser
|
| Moi j’ai la peau sur les os, sous une chemise usée
|
| J’ai hélé les voisins, rassemblé mon réseau
|
| J’ai sorti mon coutelas, aiguisé mes ciseaux
|
| Et pris la décision, sans trouble ni confusion
|
| De baptiser le béké, d’une belle incision
|
| Malfaisant, insolent, sur son trône, installé
|
| Estimant comme son bien, des terres qu’il a volées
|
| Son destin s’ra le mien, dès qu’il s’ra esseulé
|
| Il va entendre et comprendre, et il pourra bien gueuler
|
| Je laverai l’affront, je vengerai l’Afrique
|
| Les fonds de cale et le travail forcé à coups d’triques
|
| Et si le rhum et l’argent coulent à flot
|
| C’est que j’ai un sac, qui pèse un massacre sur le dos
|
| Combien d’massacres, pour un sac de sucre?
|
| Ma vie se consacre à porter ma misère, dans un sac de sucre
|
| Combien d’massacres, pour un sac de sucre?
|
| Ma vie se consacre à porter ma misère, dans un sac de sucre
|
| Un sac de sucre
|
| Une bouteille de rhum, un sac de sucre
|
| Un sac de sucre
|
| Une bouteille de rhum ou un sac de sucre |