Sur une terre de pas plus de quarante mille âmes vivait un guerrier qu’on
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appelait Ataï
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Cultivateur de banian et d’igname, chef Komalé du peuple des Kanak
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Obtenu son titre malgré son jeune âge, dans le respect des coutumes ancestrales
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Gardien d’une quelque cinquantaine de cases, au Nord de Nouméa, la capitale
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Au contact des missionnaires, il apprend à parler le français
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Une éducation complémentaire de celle dispensée par un sorcier
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Apprendre à manier la fronde, dans la nature, se fondre, devenir une ombre,
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bien entretenir les tombes
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Sur c’qu’on appelle maintenant «la terre des colons» (la terre des colons)
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Ils veulent nous faire croire qu’ils sont ici pour l’amour de la croix
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Pourquoi nous repoussent-ils de nos forêts moites, si ce n’est pour le commerce
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du bois?
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Ils sont arrivés ici avec leur bétail pour y construire des prisons et des
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bagnes
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En pensant que nous étions des cannibales, installé partout des postes de
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gendarmes
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Ils ont fait de nos femmes leurs femmes de ménage, dans l’meilleur des cas
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quand elles n’servent pas d’esclaves
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Refusent de nous les rendre quand on les réclame, c’est ce qui arriva à la
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dénommée Katia
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On a tous attendu son retour mais le maître la séquestre
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Quand un membre est amputé au groupe, c’est tout le village qui s’inquiète
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Sortez les casse-têtes, aiguisez les sagaies
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Mélanésiens, enduisez vos corps de la suie de bancoulier
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Le sang va couler (le sang va couler)
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Un raid de deux-trois personnes: Ataï et deux autres hommes
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Au secours d’une autochtone entre les griffes de ce Caldoche
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Une fois dans le corps de ferme, ils croisent des bêtes à corne
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Ceux qui piétinent leurs ancêtres avec leurs sabots venus d’Europe
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Une cheminée qui fume, ils passent la clôture, Ataï n’hésite plus,
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il garde en tête l’honneur de sa tribu
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Fracture la porte de son corps à demi-nu, étouffe le feu pour qu’la lumière
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diminue
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Ne s'éclaire qu'à la lueur d’une demi-lune, engage le combat en moins d’une
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minute
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Maître colon de la Calédonie, tenant un sabre de gendarmerie
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Déterminé à bien garder la fille qui lui sert d’esclave sexuelle toutes les
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nuits
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Tranche l’atmosphère de sa lame émoussée, frappe vers Ataï des coups désordonnés
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Mais l’Kanak se déplace comme vole la roussette, le combat rapproché,
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c’est sa grande recette
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Coup de silex sur le haut d’la tête, la machette s’encastre dans le cortex
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Le maître tombe à terre de tout son être et Ataï emmène la jeune fille sous son
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aile (sous son aile)
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Il laissera les flammes faire le reste, un feu si grand qu’il touche le ciel
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Mais la riposte viendra de l’Est, plus vite que ne le pense le chef
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Son absence a laissé son village sans protection (sans protection)
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Au loin, les détonations de fusils à piston (fusils à piston)
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Ses plantes de pied accélèrent sur le sentier pierreux
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Il voit son village et les soldats qui les forcent à sortir de chez eux
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Abandonne le groupe, fonce dans la brousse, accourt pour mieux pouvoir briser
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leurs croupes
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Tout entouré de troupes, l’horizon se brouille
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Le cœur qui s’emballe, les idées qui s’embrouillent
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Ataï a dégainé la sagaie, il lance sa lance sur l’assaillant
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La bataille a débuté, là, ça y est, il combat les traîtres tout en saignant
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Mais un ennemi lui semble familier, serait-ce un Kanak de naissance
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Qui, aux colons blancs, se serait rallié?
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Et qui lui tranche le cou au nom de la France
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Ataï fut décapité, son peuple colonisé
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Son crâne fut exposé dans les musées, comme un trophée
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Enfant du destin, enfant de la guerre
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Enfant du destin, enfant de la guerre
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Komalé, Tiendanite, Canala, Nakéty, Kouaoua, Oroe, Nekou, Azareu et Kikoue
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Enfant du destin |